1. Introduction

Dans lÕactivité économique, la plus grande partie des processus décisionnels réels de pré-contrat englobe lÕanalyse et la valorisation de nombreux aspects. Ces multiples aspects sont en général pris en compte selon plusieurs critères dÕexigence préétablis. Ainsi, le recours à une méthodologie multicritère pour analyser les problèmes se justifie dÕune façon tout à fait naturelle.

Cela se produit également au sein des appels dÕoffres de construction des travaux publics ou privés dans lesquels, pour le choix de lÕoffre la plus favorable, il existe presque toujours un grand nombre dÕaspects à considérer. Ces aspects sont pris en compte selon un ensemble de critères et/ou sous-critères qui, en général, peuvent se regrouper en trois points de vue (ou critères globaux) fondamentaux :

1. La qualité.

2. Le coût.

3. Le délai.

Dans le groupe des critères/sous-critères relatifs à "la qualité" il faut tenir compte de la pondération de multiples facteurs, lesquels dépendent des exigences fonctionnelles des travaux, de la dimension des travaux, de la diversité des technologies à utiliser, etc.

Le critère "coût" peut également dépendre dÕindicateurs et sous-critères fort variés (qui seulement dans des cas très particuliers peuvent se résumer au prix des travaux) puisque, en général, il faut considérer dÕautres coûts comme ceux de lÕacquisition des terrains (y compris, si nécessaire, les expropriations), de lÕindemnisation de tiers, des licenciements, etc.

Le critère "délai" nÕest pas toujours fondé sur lÕévaluation dÕun seul paramètre : le délai global de lÕexécution des travaux. Il peut y avoir des délais intermédiaires ou parcellaires à prendre en compte, voire le temps dÕoccupation de lÕespace public quÕil faut minimiser sans tenir compte du délai dÕentrée en fonctionnement du projet final.

Ainsi, pour faire face à des situations tellement complexes (du fait du grand nombre de facteurs à prendre en compte), si nous voulons obtenir et rassurer une bonne décision, le recours aux méthodologies dÕanalyse multicritère est pratiquement indispensable.

2. Le cas du Métro de Porto

Dans le cadre des appels dÕoffres publics qui ont été mis en place jusquÕà présent, le Métro de Porto, S.A., a utilisé, en ce qui concerne lÕaide aux décisions pour lÕadjudication, une des méthodologies dÕanalyse multicritère : lÕapproche MACBETH de Carlos Bana e Costa et Jean-Claude Vansnick.

Trois appels dÕoffres ont été mis en place :

Le premier de ces concours, à son tour, a été développé en trois phases (lÕapproche MACBETH ayant été appliquée dans chacune de ces phases) :

- La pré-qualification.

- La sélection.

- La négociation.

Etant donné quÕil sÕagissait dÕappels dÕoffres prenant en compte des objets fort différents (remarquons au passage que, pour le concours du Réseau, la première phase sÕest également différenciée des autres quant à lÕobjet puisque se sont qualifiés des concurrents et non pas encore des offres) la structure des concours et les critères appliqués ont été, par conséquent, également assez différenciés. Il serait fastidieux de les caractériser tous ici. De la même manière, ce nÕest pas le moyen le mieux adapté pour rappeler les contours de lÕapproche MACBETH.

Mais, pour ne pas manquer dÕillustrer ce qui a été dit auparavant à propos de la multiplicité des facteurs à considérer, nous pouvons prendre en compte quelques références relatives aux deuxième et troisième phases (sélection et négociation) du concours du Réseau du Métro.

Dans un premier temps, nous pouvons clarifier que, dans la deuxième phase (la sélection), ont été présentées huit propositions par quatre Groupements Concurrents ayant comme base le développement technique des solutions au niveau de lÕétude préliminaire. Cela devrait respecter ce qui a été préalablement déterminé : seules les deux meilleures ont été choisies pour la troisième phase (la négociation). Dans cette phase, les deux Concurrents ont été invités à développer lÕétude des solutions au niveau de lÕavant-projet en dehors de la négociation contractuelle.

Nous avons bien évidemment utilisé les mêmes critères pour ces deux phases. Ces critères ont été structurés de la manière suivante :

A- La qualité globale du système et du service à rendre.

B- Les coûts associés aux travaux.

C- Les délais dÕentrée en fonctionnement

De son côté, le critère A a été subdivisé en cinq sous-critères de la façon suivante :

A1- Efficacité dans la réalisation de la fonction transport.

A2- Adéquation du système de lÕorganisation et du contrôle.

A3- Insertion dans le tissu urbain.

A4- Qualité dans le processus afin dÕatteindre la solution finale.

A5- Impact sur lÕéconomie régionale.

Pour établir les poids, nous avons utilisé lÕapproche MACBETH de la façon suivante : dans un premier temps, nous lÕavons appliquée pour déterminer les poids des critères A, B et C ; ensuite, lÕapproche a été utilisée pour fixer les poids des sous-critères relatifs au critère A. Le résultat a été le suivant :

Les facteurs à considérer dans lÕappréciation de chaque critère et sous-critère ont été en général très nombreux. Si on prend seulement lÕexemple du sous-critère A1, ces facteurs (qui génèrent autant dÕautres indicateurs) ont été divisés en deux groupes : lÕun relatif à la qualité du service dans des conditions normales de fonctionnement, lÕautre, relatif à la versatilité productive.

Dans le premier groupe, nous avons analysé des aspects comme lÕinformation au public et la signalétique (à lÕintérieur et en dehors des stations et dans le matériel roulant), lÕaccès et la commodité (pour lÕaccès au quai, pour lÕembarquement et le désembarquement et le transbordement, pour lÕattente et à bord), la facilité dÕutilisation pour les personnes à mobilité réduite, la rapidité, la régularité et la fréquence de passage des véhicules, la sécurité, etc.

Dans le second groupe, nous avons considéré les aspects rapportés avec dÕéventuelles variations de lÕoffre, conséquences des altérations de la demande, bien comme des altérations du programme normal de circulation face à des perturbations externes et internes.

Evidemment, toutes ces spécifications ont été portées au préalable à la connaissance des Concurrents dans les documents du Concours (Programme et Cahier des Charges) et dans le Règlement dÕEvaluation (également divulgué avec antécédence relativement à la remise des offres) où les règles qui allaient être appliquées étaient explicitées, incluant la définition des niveaux de référence (Neutre et Bon).

La Commission dÕEvaluation a compté avec lÕappui de Consultants (spécialistes dans les divers aspects et technologies concernées) qui ont élaborè des rapports dÕappréciation et a procédé à la valorisation des offres à partir de chacun des critères et sous-critères, ce qui détermina la classification finale de celles-ci. Pour tester la solidité des résultats, elle les a soumis encore à des analyses de sensibilité avant de formuler la proposition de décision au Conseil dÕAdministration de lÕEntreprise.

Afin de garantir la meilleure application de lÕapproche MACBETH, la Commission dÕEvaluation a été appuyée, comme Consultant, par le Professeur Carlos Bana e Costa.

4. Conclusion

LÕexpérience de lÕapplication, dans le Métro de Porto, dÕune méthodologie dÕanalyse multicritère (dans ce cas précis, lÕapproche MACBETH) nous permet dÕapporter un témoignage sur son utilisation.

La première constatation est que la méthode nÕest pas dÕune compréhension très facile, exigeant un certain effort pour bien la comprendre dans une premier temps. Cependant, après ce premier effort, elle devient dÕune application facile (dans lÕoptique de lÕutilisateur) puisquÕil est demandé seulement, aux ´ évaluateurs ª de comparer les offres par pair, selon chaque critère ou sous-critère. LÕexercice pour la fixation des poids des critères est pareil.

DÕautre part, lÕapproche est applicable soit pour des réalités mesurables, soit pour des caractéristiques difficiles à quantifier (mais sur lesquelles il est possible de formuler des jugements comparatifs), ce qui lui confère une énorme latitude dÕutilisation.

Une autre de ses caractéristiques importantes, au nom de la rigueur, est celle qui lui permet de garantir la cohérence des échelles de valorisation avec le poids des critères ; fait qui ne sÕest pas enregistré dans la plupart des classements par méthodologies multicritère où, ´jouantª avec les descripteurs valorisants, on a déprécié la logique inhérente aux pondérations relatives des critères. De plus, lÕapproche MACBETH détecte et annule (ou permet lÕannulation) dÕéventuelles inconsistances entre les jugements formulés.

Si on lÕapplique avec les soins nécessaires, on vérifie quÕelle conduit à des résultats/conclusions cohérents avec le ´ flair ª des juges/décideurs (sensibilité holistique).

Pour toutes ces raisons, elle procure une sécurité (ou, au moins, une sensation de sécurité) au juge/décideur et dÕun autre côté, elle ne constitue pas de facteur restrictif à la décision de ´l´évaluateurª qui conserve son indépendance.

Face à ce qui vient dÕêtre exposé, nous pouvons alors conclure quÕelle est une réelle ´ plus-value ª dans le processus de décision.